Introduction à la situation

En mars 2020, le Nouveau Brunswick connaît ses premiers cas de COVID 19 et évolue rapidement vers le confinement. Pendant plus d’une année et demie de restrictions publiques et de mesures de distanciation sociale, de nombreux termes émergent, se répandent, et deviennent omniprésents dans le vocabulaire quotidien ainsi que dans les points d’information. Il s’agit notamment d’expressions comme « nouvelle normalité », « aplatir la courbe », « bulle familiale » ou encore « sans précédent ». Cette dernière, bien que vraie et omniprésente dans la vie d’une très grande partie de la population de la province, n’est pas totalement exacte. En effet, un siècle plus tôt, la grippe espagnole avait plongé la province dans un état d’incertitude similaire. À l’instar de la COVID 19 aujourd’hui, la population du Nouveau Brunswick d’alors n’avait jamais vécu quoi que ce soit de comparable à une épidémie de grippe. Cette exposition virtuelle permet de faire connaître l’histoire de la grippe espagnole au Nouveau Brunswick, grâce à différents documents hébergés aux Archives provinciales du Nouveau Brunswick.

La grippe espagnole était due à un virus H1N1 ayant tout d’abord touché les soldats au printemps 1918. La deuxième vague est arrivée à l’été 1918, lorsque, en partie à cause de ces mêmes soldats, le virus s’est répandu dans le monde entier. Cette vague de 1918 a été la pire, touchant essentiellement des jeunes dans la vingtaine ou la trentaine (Lam et Lee, Flu Pandemic and You, 45 6; 59). Le Nouveau Brunswick n’a pas fait exception et a surtout souffert en octobre et en novembre 1918 (Jenkins, « Baptism of Fire »; 336). Entre octobre 1918 et janvier 1919, la province a connu plus de 35 000 cas et subi plus de 1 400 décès (Jenkins, « Baptism of Fire »; 317). Les soldats qui débarquaient dans les ports de Montréal, Québec et Halifax étaient principalement responsables de la diffusion du virus au Nouveau Brunswick. Dans le même ordre d’idée, des recrues militaires infectées, venues de Boston, se rendaient en train dans des centres d’entraînement à Saint John et à Sussex. Les bûcherons québécois constituaient une autre source d’infection, répandant la grippe dans les chantiers d’exploitation forestière (Jenkins, « Baptism of Fire »; 331 2). Au Canada, la maladie a d’abord frappé l’est du pays, avant de se répandre vers l’ouest par le biais du chemin de fer (Jenkins, « Baptism of Fire »; 319). Bien que la province ait affiché le deuxième taux de décès le plus bas au pays, à 4 ‰, la pandémie a tout de même ébranlé les collectivités du Nouveau Brunswick (Jenkins, « Baptism of Fire »; 318). En 1919 et en 1920, deux autres vagues de ce même virus, bien que moins graves, ont également frappé la province (Lam et Lee, Flu Pandemic and You, 59; 46).

« J’avais à peu près comme douze, onze, douze ans pis j’ai un de mes cousins moé qui passe pour avoir enterrer en vie, y était dans un coma pis le curé qu’on avait […] quand la grippe espagnol a commencé la y a barrer son église pas de messe, pas rien en toute, pis papa y était dans le bois y était cook pour une dizaine d’homme pis ces homes on toutes eu la grippe pis on y a pas pu sortir du bois, le docteur avait montrer pis y a comme y faut pis après ça ben papa savait lire toujours a réchapper ses gars »

M. Mme Émile Michaud

En dépit de son nom, la grippe espagnole n’était pas originaire d’Espagne. Pour les gens de l’extérieur, ce pays semblait souffrir plus durement que d’autres nations, en raison de la place prise par la pandémie dans les journaux. Toutefois, cela était essentiellement dû au fait que, l’Espagne étant restée neutre durant la Première Guerre mondiale, la presse y était libre de traiter, de manière détaillée, de la première vague. D’autres pays n’accordaient pas au virus la même couverture médiatique, de crainte que des nouvelles sur une crise sanitaire ne détournent l’attention du public de la guerre et n’affectent le moral du front intérieur (Lam et Lee, Flu Pandemic and You, 65). Pourtant, c’est une base militaire américaine au Kansas qui a signalé les premiers cas connus de grippe espagnole.Les recrues locales de l’armée ont diffusé le virus dans différents camps d’entraînement militaires, permettant finalement à la maladie d’accompagner les soldats dans le monde entier (Lam et Lee, Flu Pandemic and You, 45). De nombreuses sources dans cette collection désignent cette éclosion comme une « épidémie », les responsables gouvernementaux et la population étant surtout préoccupés, à l’échelon local, par la situation de la grippe espagnole dans la province. Toutefois, la grippe espagnole a eu des conséquences internationales et il s’agissait bien d’une véritable pandémie. Cette pandémie a été la cause d’environ 40 à 100 millions de décès, tuant plus de gens que la Première Guerre mondiale elle même (Lam et Lee, Flu Pandemic and You, 49).

Description de sa rencontre avec la grippe, à l’armée:

« J’étais en Angleterre dans le temps de la grippe espagnole. Tu sais, ceux qui prenait la grippe, ils les mettaient dans une chute, non une hute, on n’avait pas le droit. D’aller voir, rien pas le chassis. Ils les enterraient par dix et douze en même temps »


« Sur le bateau il y en n’a eu six de morts, quand on n’a traversé. Et ils les enterraient dans l’eau »

M. Docithé Lang

Cette collection de textes et de photographies documente la façon dont la grippe espagnole a touché la population du Nouveau Brunswick entre 1918 et 1920. Les Archives provinciales du Nouveau Brunswick hébergent tous les principaux documents présentés dans cette exposition.


Résumé de l’expérience du Nouveau Brunswick par rapport à la grippe « espagnole », abordant la façon dont le ministère de la Santé a rapidement demandé la fermeture des édifices publics, ainsi que les efforts des bénévoles pour permettre au Nouveau Brunswick de surmonter la pandémie avec un nombre de décès comparativement plus faible que dans d’autres régions.

Sources: RS136-L5d3: Archives du sous ministre de la Santé.

« C’est triste ça tombait comme des mouches »

- Mme Thomas Morin


Rapport sur la « grippe espagnole » et ses symptômes préparé par le Conseil provincial de la santé de l’Ontario.

Source: RS136-L5d5.1: Archives du sous ministre de la Santé.


Répartition du nombre de cas de grippe espagnole entre les différentes régions du Nouveau Brunswick le 6 novembre 1918; d’une manière générale, la plupart des régions ont connu un nombre relativement limité de cas après les premières éclosions du virus.

Source: RS136-L5d2: Archives du sous ministre de la Santé.

Mises à jour concernant les régions suivantes: Petitcodiac et ses environs; Cody’s, comté de Queens, et ses environs; Shediac et ses environs; Chipman, comté de Queens, et ses environs; Bouctouche et ses environs; Keswick et ses environs.

Mises à jour concernant les régions suivantes: Stanley, comté de York, et ses environs; Glenwood et les environs de la rivière, comté de Kings; Edmundston, comté de Madawaska, et ses environs; Andover, comté de Victoria, et ses environs; St. Stephen et Milltown et leurs environs.

Mises à jour concernant les régions suivantes: St. George, comté de Charlotte, et le district côtier; Hartland, comté de Carleton, et ses environs; Chatham et ses environs; Bathurst et ses environs.

Mises à jour concernant les régions suivantes: Bathurst et ses environs (suite); Sackville, comté de Westmorland, et ses environs; Dorchester et ses environs; Campbellton et ses environs.

Mise à jour concernant Rogersville et ses environs: présente le vote sur la décision de lever l’interdiction, toutes les régions, sauf trois, ayant voté pour.


Couverture, à l’échelle de la province, des éclosions de grippe espagnole, dans le numéro du 11 novembre 1918 du St. John Standard, une attention particulière étant portée sur la situation désastreuse dans les exploitations forestières de Tobique.

Source: MC1438: fonds St. John Standard, F03797.


Tableau montrant le nombre de cas de grippe espagnole et les victimes dans différentes régions du Nouveau Brunswick, durant les mois d’octobre et de novembre 1918, indiquant un total général de 26 686 cas et 1 046 décès. Renseignements obtenus après consultation des présidents et des secrétaires des conseils locaux.

Sources: RS136-L5d3 (6) and RS136-L5d3 (5): Archives du sous ministre de la Santé.

Contexte sur le tableau joint, avec des commentaires sur la gravité de la pandémie de grippe espagnole de 1918 faisant référence à l’éclosion comme à l’une des épidémies les plus graves de l’époque moderne.

Tableau indiquant le nombre de cas et de victimes de la grippe espagnole, au cours des mois d’octobre et novembre 1918, pour les régions suivantes: Marysville; Fredericton; Moncton; comté d’Albert; comté de Northumberland; comté de Kent; comté de Gloucester; Campbellton; comté de Madawaska; Edmundston; comté de Carleton; comté de Victoria; comté de Charlotte; St. John et comté de Saint Jean.


Mise à jour du ministère de la Santé sur les comtés de Victoria et Madawaska, adressée au ministre de la Santé, William F. Roberts, par le médecin hygiéniste en chef, George G. Melvin, en date du 8 novembre. Melvin décrit un hôpital d’urgence établi dans le comté de Victoria et un accroissement de la production de cercueils à Grand Sault. Il note également les efforts des bénévoles dans la lutte contre la grippe espagnole dans le comté de Madawaska.

Source: RS136–L5b: Records of the Deputy Minister of Health: Archives du sous ministre de la Santé.


Rapport, publié dans le numéro du 18 octobre 1918 du Daily Telegraph de Saint John, sur le décès, causé par la grippe espagnole, de quatre jeunes gens dans la région de Newcastle.

Source: MC1687: fonds du Daily Telegraph, film F13272.


Dossier funéraire d’Eli Adams, un marin de 23 ans originaire de Grenade, décédé de la grippe espagnole lors d’une épidémie hospitalière à Saint John, le 11 novembre 1918.

1918.11.11

Source: MC793: fonds du salon funéraire Brenan, film F21512.


Dossiers funéraires de Vada Wain Gray, une jeune fille de 19 ans originaire de Three Brooks dans le comté de Victoria, et de son fils de 18 mois, Eldon Hoyt Gray, décédés de la grippe espagnole le 1er janvier 1919.

1919.01.01

Source: MC793: fonds du salon funéraire Brenan, film F21512.


Dossier funéraire de Marion Jinkins, une petite fille de 7 ans de Toronto, en Ontario, décédée de la grippe espagnole et d’une pneumonie à l’hôpital Parks, à Saint John, le 31 janvier 1919.

1919.01.31

Source: MC793: fonds du salon funéraire Brenan, film F21512.


Discours du député provincial de Shippagan John G. Robichaud, durant une réunion de l’Assemblée législative, le 6 mars 1919, qui déplore la perte immense pour le Nouveau Brunswick due aux décès au sein de sa population à cause de la grippe espagnole. Il insiste sur le grand nombre de victimes décédées durant leur prime jeunesse, avant même qu’elles aient pu contribuer de tout leur potentiel à leur famille et à leur métier.

Source: RS4: Journaux publiés des délibérations de l’Assemblée législative (rapports synoptiques), FF257.


Dossier funéraire du brossier Hazel G. Mersereau qui travaillait à la fabrique de brosses Simms, à Saint John. Il est décédé à l’âge de 24 ans, après une bataille de quatre jours contre la grippe espagnole, le 18 février 1920.

1920.02.18

Source: MC793: fonds du salon funéraire Brenan