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Le chemin de fer d'autrefois au Nouveau-Brunswick


Introduction

À compter des années 1850, le Nouveau-Brunswick a connu une grande période de développement du chemin de fer. C'était la même chose dans les autres provinces de l'Atlantique et ailleurs au Canada. Le besoin d'établir des liens commerciaux a été un facteur déterminant de l'essor du chemin de fer. Un ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick devenu lieutenant-gouverneur de la province, Samuel L. Tilley, n'a-t-il pas dit en descendant de train lors du voyage inaugural de Truro, en Nouvelle-Écosse, à Lévis, au Québec, que dorénavant, le baril de farine coûterait un dollar de moins au Nouveau-Brunswick! La province avait posé comme condition d'entrée dans la Confédération canadienne la construction d'un chemin de fer pour la relier économiquement aux provinces canadiennes déjà établies.

Au 19e siècle, la prospérité locale et provinciale était associée au chemin de fer. L'avènement du rail a marqué le passage de l'ère de la voile et du bois à celle du fer et du charbon. Le chemin de fer permettait de relier les petits centres entre eux et de les relier également aux plus grands centres. Il facilitait les rapports d'ordre économique avec le Canada, le Maine et l'Europe, en particulier l'Angleterre, car les voies maritimes et ferroviaires se complétaient bien.

Les grandes voies de chemin de fer et la multitude de routes locales ont laissé des empreintes sur le territoire de notre province avant d'être supplantées par le transport routier moderne plus flexible et mieux adapté aux besoins actuels.


Les grandes voies de chemin de fer

Une des premières grandes voies de chemin de fer qui a traversé le territoire du Nouveau-Brunswick a été le chemin de fer Intercolonial du circuit Nouvelle-Écosse-Lévis inauguré en 1876. Le trajet adopté par un ingénieur du rail canadien, Sandford Fleming, passait par Moncton, Newcastle, Dalhousie, Campbellton et traversait en Gaspésie. L'Intercolonial reliait les Maritimes aux autres provinces de la nouvelle Confédération canadienne.

La ville de Saint John, important centre manufacturier et commercial, était reliée à l'Intercolonial par la voie de l'European and North American Railway (ENAR) qui faisait le trajet de Saint John à Pointe-du-Chêne et Shediac, région commerciale d'importance. La construction de ce chemin de fer avait pris quelques années en se faisant par petites sections à la fois. L'inauguration de l'ENAR a eu lieu en 1860. Ce trajet ferroviaire constituait un raccourci comparativement à l'itinéraire en bateau par la baie de Fundy.

Au sud de la province, le chemin de fer Canadien Pacifique passait par Moncton, Chipman, Fredericton et Woodstock et longeait le fleuve Saint-Jean jusqu'à Edmundston au nord-ouest. Le Canadien Pacifique acheté de nombreuses voies ferroviaires locales jusqu'au début du 20e siècle.

Le tracé de l'Intercolonial de Campbellton à Saint-Leonard inauguré en 1910 est venu compléter le quadrilatère dessiné par le rail sur le territoire provincial. Les promoteurs de ce tracé nourrissaient des projets commerciaux entre l'Europe, la péninsule gaspésienne, le Nouveau-Brunswick et le Nord-Est des États-Unis. De plus, l'Intercolonial permettait un accès plus facile à la vaste région forestière entre Campbellton et Saint-Leonard.

Au tout début du 20e siècle, le Transcontinental a fait son entrée au Nouveau-Brunswick par Edmundston vers Moncton, via Grand-Sault, Plaster Rock et Chipman. Son trajet était quelque peu semblable à celui du Canadien Pacifique qui longeait en partie le fleuve Saint-Jean. En 1917, le gouvernement fédéral fit l'acquisition de plusieurs chemins de fer dont le Transcontinental et l'Intercolonial et nomma cette nouvelle société ferroviaire la Compagnie des chemins de fer nationaux connu sous le nom du Canadien National. Un important centre d'ateliers de réparation, d'entretien et de peinture créé par cette société s'est développé à Moncton et y est resté jusqu'à la fin du 20e siècle.


D'autres voies de chemin de fer

De très nombreuses autres voies de chemin de fer, qui servaient de voies de raccordement, ont été construites en même temps que les grandes voies. Elles étaient bien souvent issues de moyens modestes. Plus étroites et parfois moins solides, ces voies n'étaient pas nécessairement fonctionnelles en hiver. Les trajets étaient plus ou moins longs et certains même très courts, tel le circuit Hampton-St. Martins.

La construction des n'était pas planifiée à l'échelle provinciale. Ces voies ferroviaires étaient plutôt construites par des promoteurs économiques locaux au gré des capacités et des ambitions des collectivités et des régions. Souvent, elles étaient construites pour réaliser un rêve. Certaines de ces voies ont été en service pendant quelques années seulement. Toutefois, plusieurs ont existé jusqu'au milieu du 20e siècle et au-delà, grâce aux deux grandes sociétés, le Canadien Pacifique et le Canadien National qui, à compter de 1890, les ont achetées pour rentabiliser leur présence au Nouveau-Brunswick.



Le réaménagement du territoire naturel

L'expression " faire son chemin " s'applique bien au chemin de fer, car il a modifié l'aménagement territorial même là où des traits naturels du paysage se sont posés en réels obstacles à son passage. Par exemple, il a fallu construire un chemin ponté sur les marais de Sackville, creuser le roc près de Campbellton et percer un tunnel à Morrissey Rock. Comment traverser en train les chutes réversibles à Saint John ? Quel type de pont? C'était un défi considérable pour la technologie et les connaissances du 19e siècle.

En terrain peu accidenté, et souvent boisé, le paysage a posé un moins grand défi. La construction du chemin de fer a nécessité de couper les arbres pour ouvrir la voie, puis ont suivi le nivelage du terrain, le léger haussement de la voie par rapport au niveau naturel, et l'ajout de cailloux, des traverses et des rails. Après la construction du chemin de fer, l'installation de réservoirs d'eau le long de la voie modifiait encore un peu le paysage, en hauteur cette fois, ainsi que la pose de fils télégraphiques et, plus tard, téléphoniques.


Le réaménagement en territoire organisé

En territoire habité et cultivé, il a fallu déménager des bâtiments. Des sections de champs de culture ont disparu pour faire place aux rails. On estime qu'environ 300 bâtiments de ferme ont été déplacés pour permettre le passage du Transcontinental dans le seul comté de Madawaska, au début du 20e siècle.

Le réseau de chemin de fer a aussi entraîné l'ajout d'édifices sur son passage. Par exemple, 25 gares et quais de départ et d'arrivée ont été construits le long du trajet du Gulf Shore Railway, un chemin de fer local dans la Péninsule acadienne. Certaines gares ferroviaires étaient d'architecture majestueuse telle celle de Rothesay (ENAR, 1858) et celle du village de McAdam qui est très connue (Canadien Pacifique, 1902). Ces deux gares ont été classées sites historiques nationaux. L'ancienne gare de Kedgwick (Canadien National, 1919-1920) est un site historique provincial. Autour des gares, il était courant de voir des entrepôts, des lieux d'hébergement et de restauration, de même qu'un réseau de petits chemins qui menaient à la gare depuis la route principale.

Le passage du chemin de fer influençait le développement des collectivités. L'Intercolonial a certes favorisé l'ouverture de nouvelles paroisses, qui ont prospéré telles que Saint-Quentin et Kedgwick, toutes deux situées au centre d'une vaste région boisée qui n'était pas facile d'accès au début des années 1900.

Le village de Saint Leonard des années 1920 avait un caractère agricole. Il s'est orienté davantage vers le secteur du commerce et des services, de l'industrie forestière à l'arrivée du Transcontinental et de l'Intercolonial. Sous l'influence de tous ces facteurs combinés, le village de Saint Leonard s'est constitué en municipalité et s'est développé au point de devenir la deuxième ville du Madawaska après Edmundston.

L'établissement du siège social et des ateliers de l'Intercolonial a largement favorisé l'urbanisation et l'industrialisation à Moncton. De 1881 à 1891, la population a augmenté de 74 % pendant que celle de l'ensemble du Nouveau-Brunswick restait stable. Le chemin de fer a eu pour effet de faire migrer la population des campagnes avoisinantes vers la ville qui était devenue un centre d'emplois des secteurs secondaire et tertiaire.


Conclusion

Lorsqu'on observe l'ensemble des tracés de la voie ferrée sur tout le territoire du Nouveau-Brunswick au 19e siècle et au début du 20e, on constate que, toutes proportions gardées, la province avait probablement un réseau plus étendu qu'ailleurs. Les services rendus ont été multiples. De plus, ce réseau a contribué à l'aménagement du territoire en imprégnant de nouveaux traits au paysage naturel.


Bibliographie

HICKEY, Daniel, dir. Moncton 1871-1929. Changements socio-économiques dans une ville ferroviaire, Moncton, Éditions d'Acadie, 1990.

LAPOINTE, Jacques F. Grande-Rivière : une page d'histoire acadienne. Monographie de la ville de Saint-Léonard, N.- B. 1789-1989, Moncton, Éditions d'Acadie, 1989.

LEBRETON, Clarence. Le " Caraquet Flyer ", Montréal, Éditions du Fleuve, 1990.

NASON, David. Railways of New Brunswick, Fredericton, New Ireland Press, 1992.

SOUCOUP, Dan. Looking Back, Halifax, Maritime Lives, 2002.

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